17 sept. 2016

Finalement, finalement, la fin



On en parle depuis des mois. On le sait, on l'attend, on le prépare. Puis le moment arrive et c'est l'heure de partir.  Cette si belle ville, cette si belle vie qui nous allait si bien, il est temps de les quitter. Pas pour quelques jours. Pour toujours.
Prononcés comme une sentence, ces mots évidemment débordent de tristesse et de nostalgie à peine voilées. Et pourtant. Moi si souvent encline à la mélancolie, elle n'a cette fois aucune prise.
C'est le moment de dire au revoir avec grandeur et honneur, et de remercier pour ces six ans et demi de beauté, d'inspiration, de bonheur indécent, sans une larme versée. De toutes façons je les ai toutes laissées prés de ma fenêtre, où je me suis postée toutes ces années pour guetter les mouvements du vent et compter le temps. C'est vrai, j'ai pleuré en fermant le rideau et la porte de cet appartement, parce que c'est elle qui me manquera vraiment.
Quelques jours plus tard et je me retrouve sur un quai de gare. Attendant le départ vers une autre vie belle et douce, embellie et adoucie par tous ces souvenirs que j'emporte avec moi: ma colline, la mouette qui prend la pose, les 'r' qui roulent, la lumière qui danse et tous ces ciels qui changent au gré du vent. Le ventre plein d'un être presque né à qui il me tarde de la présenter, cette ville où on s'est tant aimé.

24 juil. 2016

Premier adieu



Oh ma belle,
Oh ma merveille.

Comme j'ai aimé tous tes ciels,
tous tes soleils.

Ta lumière tapageuse, ravageuse, prétentieuse.

Je t'aime et je t'admire encore un peu.
Et puis je vais partir,
loin de tes humeurs,
loin de tes hauteurs.
Quitter tes courbes, tes creux, l'infini de tes gris et tous tes bleus.

Je reviendrai tu sais,
te glisser des baisers,
Tu m'auras oubliée;
Moi pas, jamais.


19 avr. 2016

Là-bas là-haut




Vous avez fait un long voyage, par la route et par l'eau. Sur le bateau, tu as été malade. La mer n'était pas sage, ton coeur s'accrochait à la rambarde. La traversée fut suffisamment longue pour qu'au moment de débarquer, encore un peu chamboulée, tu aies comme l'impression d'arriver en terre étrangère.

La terre. La terre ici marche sur le ciel qui marche sur la terre qui marche sur le ciel, avec une délicatesse infinie. Les nuages absorbent le choc et effacent les frontières. C'est beau comme une peinture que tu imaginerais avec les yeux.

Vous êtes sur une terre d'eau. Encerclée, dessinée, calibrée par elle. Vous ne l'oubliez pas, mais si vous essayiez même, elle saurait vous le rappeler. Vous avez posé vos valises sur un bout de péninsule. S'éloigner encore un peu plus, à l'ouest de l'ouest. Après ça, le néant de l'océan jusqu'au prochain continent.

Du nord au sud, tu te laisses imprégner. Le désert de rocailles, les virages serrés, les longues routes qui mènent tout droit au port, les herbes folles et les montagnes, au loin, comme un très beau papier peint. Tout autour, encore et toujours, la mer et presque aucune âme. De celles qui y vivent, peu n'y sont pas nées. Îliens aux mains calleuses, les voix sont rugueuses, les 'r' roulent sur les langues comme la houle sur les belles plages blanches. C'est beau comme une chanson que tu fredonnerais à voix haute.



Les vents te bousculent. Tu enfonces tes pieds dans l'herbe, le sable, ce qui pourrait te retenir. Tu ne pèses rien. Tu penses à ne pas trop t'approcher du bord, dans un moment de panique. Une bourrasque et tu t'envolerais.

Vous êtes en terre étrangère, vous n'êtes que de passage et le bateau bientôt, vous ramènera sur l'autre rive. Vous n'avez jamais rien vu de pareil. C'est beau comme une photo que tu prendrais entre tes mains. Vous en entassez autant que vous pouvez. Tu n'as jamais été plus loin et plus au nord de ta vie. Jamais tu ne t'aies sentie aussi isolée, seule, et vivante.




Photos: Isle of Lewis and Harris - MB