24 déc. 2014

Avent


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On se connait bien elle et moi. On s'aime depuis longtemps. Enfin, surtout moi.
Le 1er décembre, on s'est retrouvé pour un rendez-vous qui durerait vingt-quatre jours. Le premier matin, elle s'est enflammée. Comme pour m'interpeler, me prévenir. Et puis les jours suivants, je l'ai retrouvée tour à tour morcelée, éteinte, sublime, à peine éveillée, fermée, lumineuse. Six, sept, huit, neuf matins magiques, quelques chagrins, un ou deux dimanches sous les draps, si peu de ratés. Même en gris, elle était magnifique. Au fil des retrouvailles, j'ai appris à mieux la connaître. Attendre un peu plus longtemps, revenir plusieurs fois, ne pas céder à la première avance.
Au treizième jour, sa main sur ma joue. La patience récompensée.

À chaque réveil, la même excitation enfantine. De quoi se parlera-t-on aujourd'hui ? D'amour, de passion, de douceur, d'abandon, de tempête, de torpeur ou d'éternel retour. Quinze, seize, dix-sept, mille ciels par jour pour vingt-quatre jours. Jamais les mêmes, la grâce toujours. Je suis venue tous les jours. Elle était là, elle m'attendait, prête à tout recommencer encore une fois. Juste pour moi. Comme s'il n'y avait jamais eu d'hier et demain n'existait pas.

Une merveille. Et au dix-neuvième jour je l'ai quittée. Je suis partie, elle m'a donné un dernier éclat de soleil comme un baiser. Une caresse sur mon coeur.
Ce matin, j'ai pensé fort à elle. Joyeux Noël ma belle.

22 nov. 2014

Ailleurs



Mal dormi. Réveillé en sursaut par l'alarme qui gueulait depuis longtemps et un coup de pied presque gentil. Pas envie. Il faut y aller pourtant. Elle ne m'attendra pas.

Un baiser dans les cheveux, une caresse sur la jambe, je claque la porte en silence. Nuit. Vent. J'enfonce ma casquette sur le crâne, rentre les épaules, plisse les yeux. Ca va. L'habitude.
Je me presse maintenant. Besoin de la voir. Elle va être en forme, nous faire valdinguer. Ca m'excite, presque.

Quand j'arrive, le jour pointe son nez déjà tout gris. L'air est plein d'embruns. On n'y voit presque rien. J'espere que les autres sont en forme, je sens qu'elle va nous abimer. Elle est encore loin, mais elle arrive à toute berzingue.

J'ai encore un peu de temps. Je retourne ma casquette, m'allume une cigarette.
Elle finit de me réveiller complètement. Viens ma mer, je t'attends.
Je vais te prendre tout doucement, et toi, tu vas nous faire mal. Des années qu'on s'aime comme ça.

Après notre chevauchée, je descendrai du bateau un peu étourdi et les jambes flageolantes. J'irai me changer et puis ce sera le moment de manger un bout. Et d'une autre cigarette.

23 oct. 2014

Renaître les fantômes

Pénombre tamisée, tu n'as allumé que la petite lampe. Le fauteuil est douillet, il fait bon, il est à peine tard. Sur la platine tourne le morceau que tu aimes tant. Le son du piano, rauque, brut et ces coups de pédales martelés résonnent dans la pièce et dans ta tête.
Tu rêves, tu divagues, en regardant par la fenêtre muer les ciels, passer les couleurs. Tu comptes les nuages en attendant la nuit qui tarde à venir. C'est l'heure bleue.
Le piano se fait langoureux, tu penses à cette femme que tu n'as plus vu depuis si longtemps. Elle était belle. Elle était merveilleuse.
Le piano gronde, tu essayes de te rappeler l'odeur de sa peau, le goût de son cou, la chaleur de ses yeux.
Face B. Tu fermes les yeux, cherches ses courbes et ses creux. Le piano vibre, te voilà le coeur plein, le ventre électrique.
Tu ne l'attendais pas, le pianiste de génie est allé la chercher pour toi. Dans le noir de ta mémoire, elle guettait ses respirations etouffées comme un appel juste susurré.
Sur le vinyl, les mains du musicien terminent leur danse improvisée. Elle est assise près de toi et regarde avec toi le ciel devenir encre.

14 oct. 2014

A quoi tu penses?




7h20 du matin,  il est trop tôt pour un dimanche.
Je devrais retourner près de toi, mais je viens de me faire happer par elle. Mon autre amour. Cette ville que j'ai tant aimé, dés le premier jour. Comme le grand amour, je l'adore passionnément et j'ai pour elle une tendresse infinie. Je lui passerais tout, ses dérapages, ses caprices. Les années passent, son pouvoir reste d'une étonnante justesse. Je pose sur elle un regard amoureux, mais lucide. Je la connais séductrice, je sais que d'autres la regardent et l'aiment. Je sais que les jalouser serait deplacé. Je suis une parmi tant de ses conquêtes. Comme le grand amour, je m'en contente. Elle sait me retenir. D'un battement de cils, me faire oublier tous les autres, me faire croire que je suis la seule, l'unique, la plus belle et la plus importante de ses âmes.
Et quand aux premieres heures du jour elle m'attire à elle avec toute sa douceur, serre mon coeur de toute sa lumière, je realise que je ne peux plus partir.
Depuis longtemps, je ne peux plus la quitter. 

20 sept. 2014

L'amour la nuit







































Amour, viens. Prends ma main, suis moi.
Je t'emmène au bout de la nuit, au coin de la rue.
Je te promets un instant de douceur, un éclair de passion.

Amour, viens. Dans mes bras, viens.
Derriere la dernière maison, la route est libre.
On sera seuls, avec le ciel et nos désirs.

Amour viens. Laisse moi te porter.
Accroche toi à mon cou, à mon sourire.
La nuit tombe, c'est juste là.

Amour viens, regarde moi.
Tu es si beau, le soleil se couche pour toi.
Dans la pénombre, je t'ouvre le chemin.
 
Mon amour, cours.
Bientôt la nuit sera à nous
On se dira des mots fous.
On parlera d'avenir et de plaisir.

Le temps se sera arrêté pour laisser passer nos corps enfiévrés.
Sur les pavés mouillés danseront nos ombres,
à la gloire de la nuit, à tes yeux qui rient,
Mon amour.

6 sept. 2014

Festival


Parce que nous sommes des êtres de rien. Ceints par la ville, noyés parmi les âmes.
Parce que nous sommes des êtres de néant, anonymes et furieux.
Parce que la rue nous avale, les hauts murs nous dévorent.
Parce que dans la foule si dense, qui danse, qui se fout de demain et de tout, qui nous reconnaitra?

Au pub qui fait le coin de la rue pavée, les corps se pressent, les voix montent. Personne ne s'écoute. Accoudé au bar, ce comédien qui n'a plus d'âge. Tout le monde le connait, aucun ne le voit. Dans la main, un verre de whisky qu'on a du mal à finir, la solitude. Le bois qui grince, les rires qui fusent. Ça sent la bière, ça pue la pluie. On vous resserre? Merci. Ça tient à peine debout. Ça veut dormir, c'est prêt à vomir. Demain, ça voudra mourir.

Elle est jolie.
Ça essaye de parler et ça grommelle. Trouver ce mot qui rime avec beauty. Sweety? Tristesse. Ça rentrera seul ce soir. Bien sûr. Reprendre un verre pour fêter cette douce certitude.

Dehors la pluie tombe drue et froide. Les feux d'artifices embrasent le ciel. Il est presque minuit. Ca tangue, il s'agrippe à son bar. Tous les étés il vient se perdre ici, se mêler aux milliers d'autres qui viennent vivre. Mais les trente jours et trente nuits sont passés.

À l'aube les ciels seront vides et nous finirons seuls. Avec nos idées sombres et nos envies d'en découdre. Avec qui? Ceux qui ne sont pas d'ici seront partis. Resteront les décombres, nos corps fatigués et nos âmes engourdies.

Lui mettra ses lunettes noires, s'ébrouera pour chasser son mal de crâne et montera dans le train sans se retourner. Décompte. Plus que 335 nouveaux jours à tenir.

20 juil. 2014

Juillet

Les jambes nues, je marche vers le sud, le soleil encore haut dans le dos. Il est tard déjà mais ce soir la nuit ne vient pas.
Les jambes nues, la peau qui s'embrase.
La température n'est pas très élevée, mais le soleil déchaîne ses rayons sur ma nuque. Démonstration de force astrale. Regarde comme je suis là. Sens ma puissance, sens ma présence ma fée. Je t'entends quand tu m'espère, je te vois quand tu me guettes. Tous ces efforts, ils sont pour toi. Pour ton corps qui s'enflamme quand il m'aperçoit.

Je laisse la lumière derrière moi. Au devant, la guerre approche. Deux fronts s'apprêtent à se heurter. Bleu contre gris, clair contre lourd de pluie. Combat de couleurs, de matières, à cette heure l'issue est encore incertaine.

Plus frêle, le ciel d'été devrait vite rendre les armes. Il résiste pourtant. Sous la menace grisâtre, il ne flanche pas. Son espace rétrécit à vue d'oeil, je retiens mon souffle. La chaleur sur ma nuque me laisse encore espérer un sursis. Allez! Trouve la force pour un dernier assaut. Lutte! Avant de disparaitre tout à fait, mangé tout entier par la pâle froideur d'un soir de juillet raté.

Quelques mètres en avant, quelques secondes de temps et le vent frais qui se lève m'annonce finalement le vainqueur. Je remets ma veste, j'accélère le pas.
Pas ce soir encore. Demain peut-être.



6 juil. 2014

Nocturne

Et quand tu ne dors pas, qu'est-ce que tu vois? 
A quoi tu penses? Qu'est-ce que tu te chantes?
Dans tes draps, la danse infinie. Tourne et tourne et tourne, jusqu'au tournis.
Lève-toi! Ne reste pas là.
Allô Maman, c'est moi. Ca va pas.
J'ai mal au cœur. J'ai mal au corps.

Et quand tu ne dors pas, où sont tes rêves?
Crevés comme toi. Oubliés, terminés.
Derviche tourneur implacable. Tourne et tourne et tourne, jusqu’aux étoiles.
Debout! Ne laisse pas la nuit gagner.
Allô Maman, c'est encore moi.
J'ai peur du noir, j'ai peur de la mort.

Petit matin, enfin. 
La lumiere est si belle. 
Doucement, remue les doigts. Sur ta peau, le poids des draps. 
Souffle! Respire! Tu vis! 
Allô Maman, c'est toujours moi.
Rien, tout va bien. Je t'aime très fort. C'est tout. 


5 juin 2014

Ma belle allons-voir



C'est un matin de semaine, maussade de gris. Au téléphone, elle lui dit "Partons! fuyons! la mer doit être belle." Elles prennent la route avant midi. Le ciel reste illisible. Elle sourit; "je te promets une belle surprise".

Lorsque la route s'arrête, elles laissent la voiture et finissent le chemin à pied. Froissement des feuilles, à chaque pas la lumière se fait plus agressive. Au bord de la falaise, le ciel soudain se troue, de mille lances à l'assaut, mille coups d'épée dans l'eau. C'est violent et c'est calme. Elle rit. "Tu vois, je te l'avais dit."

C'est rien, juste un peu de mer, de lumière, d'école buissonnière. Pourtant ça la bouleverse.
Elle voudrait prendre le monde dans ses bras et lui dire comme elle l'aime.
Alors elle se retourne vers son amie et lui souffle un baiser. Déjà il faut repartir.

1 juin 2014

Et des poussières

Longtemps j'ai cru avoir fermé cette parenthèse. Tout ce temps elle est restée grande ouverte, sans jamais y écrire, toujours en y songeant. Un peu. Souvent.

Partir pour mieux te retrouver, ma précieuse fenêtre. Tu m’as tant manqué.

Se jeter, ne pas penser. Pourquoi tout réinventer quand il suffit de reprendre au dernier nœud. J'aime tant ce que j'y ai laissé.

'Ici je ne reviendrai plus'. J'ai menti. En tremblant je reviens, après tant de rien. Dans un frémissement je reviens. Trois longues années sans un mot, à quoi ressemblera maintenant ce tableau?

Aucune ambition, une simple envie renouvelée.
Je laisse aux ciels le soin de donner le rythme et la direction. Qu'ils changent bien sûr.
Mes ciels, après tout, sont variables! Jamais ce titre ne fut un hasard.

A tout de suite.