27 sept. 2015

Plan séquence



Dès le réveil, au verre d'eau avec le soleil dans les yeux et les joues chauffées par son reflet dans la vitre, je pense à m'enfuir avec toi. Et je nous vois prendre le large à travers le filtre d'une caméra. Toutes les images d'aujourd'hui seront gorgées de cinéma.

Au coin de notre rue, la voiture crasseuse s'est transformée en belle décapotable. Tu es Steve McQueen, bien sûr. J'invoque Audrey Hepburn. Filons mon amour, vers la côte, de l'autre côté du bras, voir le nord et la mer.

La caméra nous suit alors qu'on file à toute allure sur les routes lacées, enlacées, entrelacées. Le soleil inonde tout, et nous sommes à contre-jour. C'est comme ça qu'on est beau. En bande son Nina Simone. Elle seule avec nous. Et le goût de la pellicule.

Sur la plage, le soleil toujours et son reflet sur l'eau fait des milliers de petits boutons d'or, tu sais, ces rivières de diamants éblouissants qui font plisser les yeux. C'est presque trop cinématographique, on ne nous croirait pas. Mais on s'en fout non?

Sur la route du retour, le soleil a fini par baisser de volume, dore les ombres et effleure ton bras posé nonchalamment sur la portière. Le haut des toits et des arbres, roses, ta peau, ponctuée de nouvelles rousseurs. Le soleil est dans notre dos. C'est aussi comme ça qu'on est beau. Plus je nous vois, plus j'en suis certaine. Tant de splendeur. Personne ne nous croira. On s'en fout, c'est à nous.